S’il est vrai que la science dans son expression matérialiste distrait l’homme dans son devoir salutaire de contempler le mystère, l’on ne saurait pour autant qualifier d’opposants à la science ceux qui souscrivent à ce point de vue.
La science dans son expression actuelle est seulement concernée par la matière, le matériel. Elle ignore ou nie l’ existence du spirituel. Ce qui est vraiment dangereux. Si l’homme est seulement matière, le sens et l’aise de la vie disparaissent. Cette idée même lui ôte toute dignité. La prévalence du point de vue matérialiste explique probablement l’angoisse qui prévaut dans le monde de nos jours. Les gens se sentent vides, angoissés malgré les meilleurs conforts de vie, les meilleures technologies. Cette affluence et ces progrès matériels seront toujours de peu de valeur à moins que nous, humains, goûtons à cette dimension qui transcende notre corps et notre mental; Cet Au-dela que la science ignore ou nie.
La science divise la vie en deux catégories: Le connu et l’inconnu. La religion divise la vie en trois catégories: Le connu, l’inconnu, et l’inconnaissable. Le connu est l’inconnu d’hier. L’inconnu est ce qui sera connu demain. Voyez-vous c’est juste une question de temps. La différence entre les deux n’est pas qualitative. L’inconnaissable est qualitativement différent du connu ou de l’inconnu. D’après certains mystiques, l’inconnaissable s’approfondit au fur à mesure que l’explorateur religieux entre en profondeur. Paracerque la science a montré ses limites, il serait désirable d’avoir une approche qui inclut la démarche scientifique mais qui ne s’arrête pas a celle-ci. Faisons usage de la science mais ne la laissons pas faire usage de nous.
Les innovations scientifiques et technologiques ont certainement libéré l’homme et les animaux d’un labeur stupide. Nous avons plus de temps pour développer notre sensitivité, notre créativité, notre contemplation et notre spiritualité. Si les camerounais, si les africains embrassent la science et ses innovations, ils auront plus de temps à se consacrer à des choses plus élevées auxquelles le pauvre ne peut prétendre. Vue dans ce sens, la religion est un luxe.
Le pauvre de Douala, de Yaoundé, de Sangmélima ou celui de Kinshasa ne pense qu’au pain et avoir un toit au dessus de lui. Et même cela, il a du mal à se l’offrir. Qu’en est-il de ses enfants ou de ses parents dont il doit s’occuper ? Sa vie entière est alourdie par des préoccupations triviales. Il a peu de temps à dévouer au divin. Et même quand il se rend au temple, à l’église ou à la mosquée, il y va pour demander de choses matérielles. Sa prière n’est guère une prière de gratitude. C’est une demande. Il veut ceci ou cela. Il ne mérite pas notre condamnation. Il doit être compris. Ses besoins sont constants et pressants. Il ne peut s’assoir paisiblement.
Jésus dit: << Regardez les Lys dans les champs, ils ne peinent pas, ils ne filent pas, et pourtant je vous dis que Salomon dans toute sa gloire n’est pas d’une telle beauté >>. C’est vrai que les Lys ne peinent ni ne filent, mais est-il possible pour le pauvre de suivre ce modèle ? Non ce serait un suicide. Jésus est dans le vrai lorsqu’ il ressort cette beauté et poétiquement évoque ce mystère. Mais ses propos restent théoriques, avec aucune utilité pratique pour la plupart des camerounais, des africains ou même la plupart dans le monde. À moins que le Camerounais devienne matériellement suffisant, à moins qu’il cesse de croire à la pauvreté, à moins qu’il n’embrasse la science et des valeurs comme le courage, la dignité et le savoir-faire, il lui sera difficile de contempler la présence du divin. Par ailleurs, ils devraient se méfier des entrepreneurs de l’esprit, n’ayant aucune expérience de l’Au-delà, qui veulent lui voler sa pitance et l’éloigner de la science et des valeurs de courage, de dignité.
Kunga Dondrup