Je viens juste de regarder le film » Le Havre » du finlandais Aki Kaurismaki. Le film raconte l’histoire d’un cireur de chaussure ,vivant dans la cité portuaire et française du Havre , qui décide d’aider un enfant immigré Africain à éviter les services d’immigration pour rejoindre sa mère à Londres. Le film m’a paru d’un réalisme cru sur la condition humaine; il présente le mouvement marin des expériences humaines qui oscillent entre joies, peines, espoirs, misères, angoisses, contradictions.
En regardant le film, on ne peut s’empêcher de penser à Soren Kiekegard, un philosophe existentialiste, qui déclarait avec raison que l’homme est dans un état d’anxiété permanente. C’est fort du même constat que Jean Paul Sartre invite l’homme à donner un sens à son existence au milieu de cette angoisse, de cette absurdité que semble être la vie. Parlant d’absurdité, on voit quelque part dans le film les souffrances d’un malade de cancer comparable aux pages d’une œuvre de Frank Kafka. Comme quoi Aki Kaurismaki lui même s’est confronté a l’absurdité des expériences de ses caractères.
Cela dit, le thème qui devrait aussi nous intéresser ici, c’est la solidarité, du souci du bien-être de l’autre comme expression de l’amour. Il faut rappeler que le film met en lumière la condition des migrants qui arrivaient sur les côtes du Calais en France où le gouvernement français laissa émerger une espèce de camp de migrants vivant dans des conditions en dessous de la dignité humaine. C’est avec cette fresque de la << Jungle de Calais>> en background que l’acte solitaire de cireur, joué par …prend toute son importance. Voilà une personne pauvre et âgée qui met tous ses efforts et ses économies pour donner la chance à une jeune immigrée, la possibilité d’un futur que l’on entreverrai comme meilleur. Cette action du cireur est appropriée, juste. Je préfère affirmer que son action est « accurate » car le mot anglais » accurate » dans son étymologie veut aussi dire « prendre soin ». Cela dit vous êtes » accurate » si vous prenez soin de quelqu’un. Vous êtes » accurate » dans votre relation si vous prenez soin de la relation. En réalité, celui qui prend vraiment soin de soi prend aussi soin des autres. Car aucun homme ne peut être heureux tout seul.
L’Europe , que certains disent être << un jardin au milieu de la jungle>>, ne peut être heureuse tant que les autres du Moyen-Orient ou de l’Afrique sont heureux. Les récents événements illustrent quelques peu cela avec les scènes de violences en France après l’assassinat de du jeune Nahel. Les Etats-Unis ne peuvent être heureux que si les pays d’Amérique Centrale et Latine sont aussi heureux. l’homme n’est qu’heureux dans un climat, dans un environnement propice au bien-être.
Le soin de l’autre, la solidarité dont je parle – qui semble être célèbre dans le film- ne peut être juste comprise intellectuellement. Tout effort d’appréhension intellectuelle de cette amour, de cette vérité existentielle sera vouée à des distorsions telles que les impérialistes culturels, religieux, ou politiques. N’ est ce pas au nom de << la responsabilité de protéger >> vantée par un certain philosophe français que la Lybie fut détruite? N’est ce pas au nom de la solidarité que Jules Ferry prêcha l’impératif des campagnes dites civilisatrices qui ont menés à la souffrance des peuples noirs? N’est ce pas le désire d’étendre la démocratie ou l’économie libérale au moyen orient qui a mené au désastres d’Irak et d’Afghanistan? Voilà des distorsions auxquelles mènent une compréhension pure mental intellectuelle de l’amour, de la solidarité humaine.
La solidarité humaine comme expression d’amour pour l’autre doit être enracinée dans la compréhension qui émerge lorsque la pensée s’éteint dans le silence de la prière, de la méditation pour laisser place à la vacuité qui révèle la fausseté de indépendance des phénomènes et la vérité de la dépense ou de l’interdépendance célébrée dans ces propos : » La vacuité est forme et la forme est vacuité. »
Kunga Gondrup