Les émissaires de la Communauté Economiques des Etats de l’Afrique de l’Ouest CEDEAO ont boycotté une mission au Niger évoquant malicieusement le » refus de l’autorisation de survol et d’atterrissage sur le territoire nigérien par les autorités de Niamey; et pourtant …
Le ministre sierra-léonais des Affaires étrangères Timothy Musa Kabba, mandaté officiellement par le Président de la Communauté économique d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) pour négocier les conditions de règlement de la crise avec le Niger, ne s’est pas rendu au rendez-vous convenu jeudi à Niamey avec le Premier ministre Lamine Zeine.
Son homologue togolais Robert Dussey, le deuxième membre du tandem désigné par la CEDEAO en décembre, l’a attendu en vain. Interrogé par ce dernier, le président de la Commission de la CEDEAO, le Gambien Omar Aliou Touray, a dit ne pas s’expliquer l’absence de Timothy Musa Kabba. Il a ajouté avoir pourtant versé 72 000 euros pour payer les frais d’affrêtement d’un avion qui devait transporter à Niamey, à partir d’Abuja, le ministre sierra-léonais des Affaires étrangères et ses homologues du Bénin et du Nigéria, a appris Mondafrique de source autorisée.
Le Premier ministre du Niger, destinataire d’une correspondance l’informant de la venue des représentants du Bénin et du Nigéria en plus des deux négociateurs officiels n’y avait pas fait obstacle. Le Niger subit depuis six mois des sanctions financières et commerciales très dures de la CEDEAO et aspire à leur levée.
Jeudi, lors d’un point de presse, Lamine Zeine a démenti une rumeur ayant circulé plus tôt à Abuja, selon laquelle les autorités nigériennes auraient interdit à la délégation de se poser à Niamey. Il a rendu publiques les autorisations de survol et d’atterrissage délivrées aux deux avions au départ de Lomé et Abuja. « Malheureusement, aujourd’hui encore, en dehors du Togo, la CEDEAO, malheureusement, n’est pas arrivée », a-t-il dit. « Ils ont prétexté n’avoir pas l’autorisation de survol et d’atterrissage sur notre territoire. Cela n’est pas fondé. Nous allons vous remettre les copies des deux autorisations. (…) Nous sommes dans l’obligation de constater qu’il y a une mauvaise foi de cette organisation et probablement des pays qui sont derrière et qui poussent à ne pas permettre à ce que notre pays (…) puisse sortir de cette trappe de punition qu’on lui impose », a-t-il poursuivi.
L’ambiguïté américaine
A Niamey, certains se demandent s’il ne faut pas voir, dans ce double-jeu diplomatique de la CEDEAO, la main des grandes puissances occidentales, au premier chef desquelles la France et les Etats-Unis. Dans une interview accordée à RFI, le secrétaire d’Etat américain Antony Blinken, de passage à Abidjan mercredi, a, en effet, réitéré son exigence de libération du Président Mohamed Bazoum, qu’il a qualifié de « très bon leader pour le Niger et très bon partenaire pour notre pays ». Il a ajouté que cette libération était « une nécessité pour que le Niger se remette sur la route de la démocratie, qu’on en finisse, qu’il y ait une transition très claire et dans un délai court pour un retour au système démocratique. » Ces conditions permettront de reprendre la coopération suspendue depuis le coup d’état, a-t-il assuré.
Selon certaines sources, les États-Unis auraient imposé à la CEDEAO de nommer la Sierra-Leone au sein de la mission chargée de négocier avec le Niger. La capitale du nord, Agadez, héberge depuis plusieurs années la plus grande base américaine de drones militaires sur le continent africain. Si, au lendemain du coup d’état du 26 juillet, les États-Unis ont semblé plus souples que la France à l’égard de la junte, cette dernière a commencé à s’interroger sur la sincérité de leur position lorsqu’ils ont prêté la main à un projet d’évasion de Mohamed Bazoum en octobre dernier.
Finalement, dans la soirée de jeudi, la CEDEAO a publié un communiqué affirmant que sa délégation avait « passé toute la journée à l’aéroport d’Abuja, prête à se rendre à Niamey. » « Malheureusement, en raison de problèmes techniques de l’avion que la commission avait affrété, le vol spécial devant conduire la délégation d’Abuja à Niamey n’a pu être effectué. La CEDEAO a présenté ses regrets aux autorités nigériennes et a fait part de sa détermination à trouver une nouvelle date en vue de reprogrammer la mission dans les plus brefs délais.»
Elle conclut ce communiqué par la promesse réitérée « de trouver un règlement négocié aux problèmes politiques dans la sous-région ». Doit-on encore y croire ???