Face aux membres de la chambre haute du parlement le 30 Novembre dernier, Louis Paul Motaze, ministre des Finances, a justifié cette hausse de l’endettement par la volonté du pouvoir de Yaoundé de développer le Cameroun et de le rendre moderne.
Selon le patron des finances, si la dette publique du Cameroun continue de s’accroître au fil des années, cela est justifié par la volonté permanente du gouvernement de léguer aux générations futures un pays développé et moderne. C’est cette justification » morbide » que Louis Paul Motaze a présenté aux Sénateurs le 30 Novembre 2022 lors de la plénière présidé par le président de ladite chambre et sur la demande des Sénateurs. « Sénateurs, si vous n’électrifiez pas votre pays, les générations futures vont trouver quoi ? C’est aujourd’hui qu’il faut investir pour que demain les générations futures vivent à l’aise. Endettons-nous pour que le Cameroun soit un pays moderne, c’est ça que le Cameroun fait ». Une excuse gouvernementale qui sonne comme l’aveu d’incompétence d’un gouvernement incapable de financer proprement et avec les propres ressources du pays ses projets de développement. Le gouvernement préfère plonger le pays dans un endettement sans fin qui pèsera certainement sur les générations futures pour absence d’une politique réelle de financement des projets qualifiés de structurants.
En 2021, la dette publique de l’État du Cameroun était de 7 558 milliards de Francs CFA contrairement à 2020 où elle était de 6 746 milliards de Francs CFA soit une hausse de 812 milliards de Francs CFA.
Pour essayer de sortir la tête de l’eau, le gouvernement a signé avec le Fonds Monétaire International (FMI) un programme Économique et Financier triennal (2021 – 2024) et qui a été présenté comme un cadre de collaboration visant à redresser la situation du Cameroun et des pays frères de l’Afrique centrale. Mais à l’évidence, cette collaboration ne se déroule pas comme prévu car lors de la première revue dudit programme du 2 au 16 Décembre 2021, le FMI a reproché au Gouvernement de n’avoir mis en œuvre que trois des huit réformes structurelles attendues entre Juillet et décembre 2021. Le gouvernement n’avait pas réalisé le diagnostic de la politique fiscale qui devait aboutir à une fiscalité de développement et à l’élargissement de l’assiette fiscale. Pour toutes ces raisons, le FMI a critiqué le Gouvernement pour ses faibles performances qui conditionnent pourtant les différents décaissements attendus dans le cadre de ce programme.
Quant à la dette intérieure, elle s’établirait à 4 100 milliards de Francs CFA. Une situation d’autant plus rédhibitoire que cette dette intérieure plombe l’activité en baissant le niveau de vie des populations dans des proportions considérables. Il n’y a donc aucun doute que cette dette intérieure dont une bonne partie est constituée d’arriérés est une source de dépression de l’activité économique et un motif de dégradation du climat social.
La société civile reste donc à cet égard très dubitative sur les perspectives du Gouvernement qui prétend stabiliser le taux d’endettement à 50% du produit intérieur Brut du pays dans les trois prochaines années au regard de l’inflation de la dette et de l’incapacité du gouvernement à trouver et à mettre en œuvre des solutions idoines. Pour cette même société civile, « c’est fondamental que les citoyens et citoyennes du Cameroun prennent conscience que le remboursement de la dette publique constitue un des postes principaux du budget de l’État et que plus un État est amené à dépenser l’argent pour rembourser la dette, moins il peut dépenser pour garantir aux citoyens du pays la satisfaction des droits humains, notamment le droit à la santé, le droit à une éducation de qualité, le droit à l’emploi, à la protection sociale etc…». Le Budget 2023 n’échappera certainement pas à cette règle.