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mercredi, 4 décembre 2024

Chronique : « Au public comme au privé, la faible rentabilité des organisations est liée à la faible valeur ajoutée créée. »

Créer de la valeur ajoutée est essentielle pour la survie d’une organisation mais surtout pour prétendre, sur le plan macroéconomique, à une société sans pauvreté où les ressources bien que rares sont plus ou moins disponibles pour assurer le bien-être des populations.

Mais dans combien d’organisations, combien d’administrations l’on crée véritablement la valeur ajoutée dans notre pays ? Au contraire, beaucoup la détruise. Au public comme au privé, la faible rentabilité des organisations est liée à la faible valeur ajoutée créée. Ce qui rend ces organisations vulnérables et très peu compétitives.

Le Rapport sur la Compétitivité Globale 2021-2022 du World Economic Forum où le Cameroun occupe le 119e rang sur 133 pays est une preuve de cette faible capacité à créer la valeur ajoutée. Le Mémorandum Économique initié en 2016 par l’Etat du Cameroun et la Banque mondiale renseigne que depuis 1994, la productivité globale de l’économie camerounaise est de 0%. Le taux de mortalité élevé des entreprises nationales, le déficit structurel de la balance commerciale et la fébrilité de l’économie camerounaise confortent cette idée. C’est dire tout simplement que l’économie camerounaise a du mal à porter les ambitions de développement du pays, notamment l’émergence à l’horizon 2035. La raison étant tout simplement la faible valeur ajoutée de cette économie.

Comment on crée donc la valeur ajoutée ?

Il convient de rappeler que la valeur ajoutée (VA) est mesurée par la différence entre la valeur totale des biens produits et celle des biens et services consommés au cours du cycle de production, soit en totalité, soit partiellement. Pour mieux comprendre comment on crée la valeur ajoutée, prenons l’exemple d’un agent de l’Etat nommé « Mouaga », qui a rang de chef de service, et qui travaille au Ministère de la Recherche Scientifique et de l’innovation (MINRESI).

Mouaga, en service dans l’administration centrale du MINRESI, est chargé d’élaborer le cadre législatif et réglementaire favorable à la création et au développement des entreprises innovantes. Pour faire ce travail, Mouaga a droit à un salaire mensuel, des frais de téléphone, des bons de carburant, des indemnités pour travaux spéciaux, un bureau équipé de matériel informatique et bien d’autres avantages et commodités pour le mettre dans de bonnes conditions de travail.

Tout cela sommé, Mouaga coûterait à l’Etat du Cameroun, la somme de 750 000F chaque mois. Un an après, le travail abattu par Mouaga a valu l’adoption d’une loi par le Parlement sur « la promotion de la Recherche-Développement et de l’innovation au Cameroun ». L’effet de cette loi transforme l’environnement économique du Cameroun et permet à l’Etat de créer des richesses d’une valeur estimée à deux milliards par an.

La valeur ajoutée créée par le travail de Mouaga est donc égale à la différence entre les deux milliards de Frs de richesses créées du fait de cette loi, et ce que Mouaga aurait coûté à l’Etat au cours de l’année de travail, ajouté aux coûts liés à l’adoption et la promulgation de cette loi qu’on peut estimer à 100 000 000F. Mathématiquement ça fait : 2 000 000 000 – [(750 000 X 12) + 100 000 000] = 1 891 000 000F. Des exemples comme celui-ci peuvent s’appliquer dans tous les domaines de la vie.

Si le travail abattu par Mouaga au cours de cette année n’avait pas impacté l’activité économique ou alors créé des richesses d’une valeur au moins supérieur d’1 F par rapport à ce qu’il aurait coûté à l’Etat au cours de la même période, on dirait que Mouaga a détruit la valeur. Et c’est le cas malheureusement pour la plupart de nos organisations où des gens perçoivent d’importantes sommes d’argent et de gros avantages sans pouvoir produire ou alors mener des actions qui aboutiraient à la production des richesses d’au moins l’équivalent des montants perçus.

Chaque travailleur (public comme privé) devrait donc se préoccuper de créer de la valeur ajoutée quelques soit son domaine d’activité car tout a, in fine, un impact ou une valeur économique. Plus la valeur ajoutée est importante, plus le pays a des ressources pour ses ambitions de développement. C’est la valeur ajoutée qui fait la croissance, c’est elle qui créée les emplois, les richesses, permet d’augmenter les salaires, de subventionner certains produits de grande consommation, de construire les écoles, les hôpitaux, les routes, les forages, les stades, les aéroports, les autoroutes, bref c’est grâce à elle que le développement inclusif et durable est possible. Pas de valeur ajoutée, pas de développement.

Pour créer la valeur ajoutée, il faut essentiellement améliorer la productivité et c’est en cela que la technologie et l’innovation sont indispensables. Et développer l’innovation au Cameroun selon la SND30 revient à construire un système camerounais d’innovation performant qui met en relations la sphère de la production, la sphère de la formation et la sphère de la recherche dans le but d’améliorer significativement la compétitivité de l’économie nationale.

 

Laurice Serge ETEKI ELOUNDOU
Expert en gouvernance et développement économique, Spécialiste des politiques de recherche et d’innovation

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