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dimanche, 22 décembre 2024

Discours de haine : Myopie coupable du gouvernement face à une fracture sociale au Cameroun

Les nombreuses tentatives effectuées par les thuriféraires du régime de Yaoundé ne trouvent en apparence pas l’écho favorable du grand nombre, ceci malgré de nombreuses actions démagogiques.

 

En réunissant ce 26 juin 2023, dans l’une des salles huppées du Djeuga Palace à Yaoundé, un parterre de spécialistes de la vie publique autour du ministre de la communication sous le patronage du Premier Ministre, Chef du Gouvernement pour prendre langue avec ces derniers sur la délicate problématique du discours de haine au sein des organes de communication, le gouvernement camerounais par sa voix la plus autorisée, vient ainsi rappeler à l’esprit de certains érudits et autres observateurs avertis de la scène nationale, les difficultés qu’ont les pouvoirs publics à faire face à cette gangrène que constitue le discours de haine au Cameroun.

 

Une véritable plaie béante qui se trouve désormais au centre de toute les grammaires institutionnelles des plus grands consommateurs de costumes de valeur, de grosses cylindrées et surtout de hoc médoc (vin de qualité). Des administrateurs installés pour la grande majorité au centre de la capitale Yaoundé, principalement au plateau Atemengue, dans le premier arrondissement, où trônent majestueusement les ministères du Cameroun. Un échec de la part du régime de Yaoundé qui, depuis plusieurs mois, ne parvient visiblement pas à réduire à sa simple expression mieux encore à éradiquer ce malaise social dont les principales prémisses sont apparues à l’aube de la campagne présidentielle le 22 septembre 2018.

Des programmes de campagne qui se sont traduits par des propos incitant à la violence, à la sédition de certaines tribus entrainant une montée en puissance des discours haineux et dangereux au sein du parti proche du pouvoir, suivis de réactions à proportion égale d’autres partis politiques sur les plateformes numériques.
« Quel beau spectacle ! Ils vont nous sentir, d’abord ils sont mêmes qui dans ce pays ? » Affirmaient certains leaders, en savourant au passage une coupe de champagne devant quelques contempteurs et autres adeptes de basses besognes. S’il est vrai que les électeurs sont amnésiques pour paraphraser les théories de nombre d’auteurs comme André Blais, dans Revue française de science politique 2003/6 (Vol. 53) ou encore Claude Cohen-Boulakia dans « L’amnésie démocratique », il se trouve, le cas échéant que l’ampleur de l’abcès, bien qu’étant incisé, ne parvient pas à faire oublier les douleurs infligées à ces millions de personnes, victimes de près ou de loin du discours de haine au Cameroun.

 

Alors, quelques interrogations se dégagent : Qu’est-ce que le discours de haine au Cameroun ? Comment se manifeste-il ? Y a-t-il une motivation profonde qui anime ce triptyque ? Qui et comment est-on à même de l’identifier objectivement au Cameroun ? Des questions qui trouvent des réponses assez théoriques lorsqu’on assiste à un de ces conclaves initiés par ses charismatiques prévaricateurs où les prétentieux convives et autres experts se régalent après des repas bien arrosés car au pays d’Eboa Lotin, il faut bien se remplir le ventre pour que la tête réfléchisse. Une pale appropriation d’une belle fable de Jean La Fontaine selon laquelle « ventre affamé n’a point d’oreilles.» Alors, rassasiés ils pourront mieux rappeler ce que c’est qu’un discours de haine à partir du préambule de la constitution camerounaise du 18 janvier 1996 qui consacre la protection de tout individu des attaques se rapportant à « ses origines, ses opinions ou croyances en matière religieuse, philosophique ou politique sous réserve du respect de l’ordre public et des bonnes mœurs. » Dès lors, des termes à l’instar de : « Serpent à deux têtes », « Nkoa », « Grassfield », « mouton du Nord », « être Bamenda », « être à gauche », « porc de Dschang », « mangeur d’homme », « mangeur de savon » « Pygmée de l’Est », « fou comme Eton » etc. vous seront analysés à travers un langage bien trop hermétique pour le commun des mortels. Tout une diatribe pour vous faire comprendre que ces expressions employées au moins une fois par chacun d’entre nous, seraient aujourd’hui les principales causes du discours haine et constituent l’épicentre de l’absence de cohésion nationale, de paix nationale et même de déstructuration du vivre ensemble.

Des mots ou groupe de mots qui par le passé, ont très souvent fait partie intégrante des éléments d’harmonie ou de rigolade entre citoyens patriotes mais qui en apparence s’illustrent malheureusement selon les gestionnaires de la fortune publique comme des vecteurs de la déconstruction de l’unité nationale. Une réalité peut tout de même se dégager de tous ces termes qui pouvaient heurter certaines sensibilités sans pour autant diviser les camerounais d’antan, c’est bien la naissance d’autres slogans plus forts de par leurs connotations politico-économiques à l’instar de « Sardinards » et « Tontinards ». Deux néologismes pensés avec minutie lors du lancement de la campagne présidentielle le 07 octobre 2018, avec pour seuls et uniques but d’obtenir une bipolarisation politique du Cameroun. Une dynamique nouvelle qui a bien réussi car à la fin des échéances politiques on peu bien constater que le pays de Um Nyobé, d’Ernest Wandji et de bien d’autres pères fondateurs de la Nation est désormais sous le joug de deux principaux camps.

Deux grandes idéologies où se trouvent d’un côté ceux qui mangent et de l’autre, ceux qui croupissent dans la misère quotidienne. Le vrai visage du discours de haine clamé depuis des mois dans les palais des bouches des autorités de Yaoundé ne se trouverait donc pas dans des petites expressions historiques et visiblement identitaires mais plutôt dans la redistribution des richesses nationales afin que tout camerounais du Nord au Sud, de l’Est à l’Ouest puisse aisément se sentir dans la répartition du gâteau national. Le grand défi de la résolution du discours de haine passe de façon quasi-évidente par la réduction de la boulimie des gens d’en haut, la réduction notable de la précarité, Une offre d’emploi pour tout et non en fonction de sa natalité, l’inclusion de toutes les couches sociales sur la base du mérite, bref une plus grande équité afin que les populations défavorisées puissent avoir une lueur d’espoir sous le soleil camerounais.

Le discours de haine est celui entre les « en haut d’en haut » face aux « en bas d’en bas » et cela n’a ni tribu, ni sexe, ni religion, ni identité, ni opinion. C’est bien ça la cause réelle du discours de haine et de la fracture sociale dont le cratère du volcan ne cesse de s’élargir et pourrait exploser si rien n’est fait.

Par Brice Ngolzok

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